lundi 11 octobre 2010

La cyclomanche (par Alex)

Sainte Mère Eglise, faisant face à la borne zéro de la voie de la liberté, à une portée de fusil d’un mannequin « parachutiste » représentant John Steele toujours suspendu au clocher de l’église, la seule et unique vague d’assaut de plus moins 400 cyclos pour les 2 parcours s’élancent à la conquête de la campagne normande. Thierry Marie, bannière américaine au vent, a pris la tête du peloton en chantant comme en ses plus beaux jours de coureur professionnel.
Un départ rapide, sur des routes étroites agrémentées de nombreux changements de direction facilite l’écrémage qui se fait comme toujours par l’arrière. Après 25 km, à la troisième bosse, c’est à mon tour d’être éjecté du peloton de tête. Un gruppetto d’une vingtaine de cyclos, suivant à 10 secondes, pour la plupart des adeptes du petit parcours espérant faire la jonction avec le premier groupe me passe en coup de vent. Je prends le parti de boire à mon aise et d’attendre le groupe suivant. Chaque année la dernière cyclo de la saison est prétexte à un petit week-end gastronomique. Cette année, c’est la Cyclomanche qui me servira de trou normand. Je me glisse dans le troisième groupe qui roule à un tempo régulier qui convient nettement mieux à mon diesel. Arrivé en bord de Manche, nous suivons pendant de nombreux km la très belle route des Caps où les côtes se font plus raides. Au 65ème km, intervient la bifurcation entre les 2 parcours, une vingtaine de cyclos m’accompagnent sur le grand parcours. Juste après la bosse de Vasteville, impossible de passer du 30 vers le 42 ou le 52, la poignée de changement de vitesse est bloquée. Le temps de remédier à ce problème, j’ai 200m dans la vue. Après avoir chassé pendant 5 km, je rentre sur le groupe au pied d’une nouvelle côte. Pour mon malheur, le peloton accélère et une cassure se produit 3 cyclos devant moi, il ne m’est pas possible de refaire immédiatement un effort pour faire le jump. Je regarde donc impuissant le groupe s’éloigner. Grâce à l’aide d’un cyclo normand, je garde le groupe en point de mire. Après une longue ligne droite de +/- 4km, nous plongeons vers la magnifique baie d’Ecalgrain, un coin de nature sauvage à découvrir. J’en profite pour admirer le paysage commenté par mon guide local. Le groupe qui nous précède s’est disloqué en passant d’une crique à l’autre. Une pancarte sommet à 2 km me rappelle à la réalité. Sans vraiment le chercher, peu avant le sommet, je rentre sur un groupe de 7 cyclos et je constate que mon guide touristique est loin derrière. Jusqu’au deuxième ravito, je m’installe comme chauffeur de ce groupe complètement démotivé. Un peu d’arithmétique m’indique qu’à cette allure le brevet d’or risque de m’échapper.
Je ravitaille rapidement et décide d’effectuer un CLM de 55 km. Cette dernière partie est moins attrayante au point de vue touristique, l’essentiel du parcours se déroulant entre 2 rangées de haies. Le dénivelé est moins important, mais le vent tantôt de côté tantôt de face contrarie la progression. J’effectue cette fin de parcours à bonne allure, ce qui me permet d’ajouter un brevet d’or supplémentaire à ma collection. Cette première et peut-être dernière édition de la Cyclomanche, sous le soleil, était longue de 180km pour un dénivelé de 1968m. Alex.

La Ronde Picarde (par Frère Tuck)

Ce vendredi matin départ pour Abbeville avec mes compagnons habituels Patrice et Arnaud afin d’aller prendre nos dossards pour effectuer, le lendemain, la traditionnelle Ronde Picarde. Pour moi cela devient une habitude (c’est la cinquième d’affilée). Après notre installation dans le gîte situé à 12 kms du départ, nous avons fais une petite mise en jambes ( +/- 30 kms) sur le début du parcours. Le samedi matin, sur la ligne de départ, retrouvaille avec Jacques Chouffart et Julien Villance. Ce dernier me demande s’ il y a d’autres TDL au départ. Ma réponse est négative je suis le seul team de lux ce jour. Jacques me demande si j’ai vu le changement de parcours sur ma feuille de route et là grosse faute… Petit briefing du sieur Chouffart, en fait les 2 parcours sont communs pendant 130 kms (cela va nous donner une course assez spéciale avec des cyclos qui font le 135 et qui veulent rouler et d’autres qui ne savent pas ce qui les attend et qui se réservent . Et à partir de la bifurcation le grand parcours va chercher 2 grosses bosses et le petit effectue les 5 derniers en rentrant sur Eaucourt (village dont Henri Sannier est le maire). La Ronde picarde est une des cyclosportives les plus rapides de la saison mais le départ est toujours assez délicat. Une route très large avec des ilots puis après une dizaine de kilomètres virage à droite sur une petite route de campagne et passage assez étroit sur un pont . Après direction la mer avec un passage dans la ville de Ault et son célèbre mur (200 mètres avec un pourcentage certain), suit la traditionnelle route des sables. Et enfin retour sur Eaucourt où je retrouve Arnaud qui m’apprend qu’il a fait troisième sur le petit parcours et qu’il faudra donc attendre le podium. Nos résultats : Arnaud 3 ème sur le 135 kms en 3h23min—39.78 de moy. René 127 ème sur le 187 kms en 5h20 – 35 de moy. Nos amis Julien et Jacques arrivent respectivement en 5h40 et 5h42. Autre très bon résultat d’une luxembourgeoise, Laure Mohnen d’Arlon, le 187 kms en 6h01 –31 de moy et première en catégorie AB. René.

mercredi 6 octobre 2010

Championnats du monde des journalistes

Les bouchers ont l'habitude de s'y étriper, les journalistes, eux, se volent dans les plumes. Certaines corporations ont la chance de pouvoir compter un championnat du monde de cyclisme réservé à ces professionnels. Et cette année, c'est la commune de Lierde, à 5 kilomètres de Brakel et donc en plein coeur des Ardennes flamandes qui accueillait le Mondial de la presse, du 17 au 19 septembre. Le rendez-vous est très officiel et même organisé sous l'égide de l'UCI. Si la majorité du peloton est européen (Italiens, Anglais, Espagnols, Hollandais, Allemands, slovènes...) on compte aussi quelques américains vivant sur le vieux continent. Vendredi : c’est le contre-la-montre par équipes qui ouvre le bal de ce mondial. Pour pouvoir aligner une formation, il faut réunir trois coureurs et être soit de la même nationalité ou travailler pour le même média. Je fais équipe avec Julien Gillebert (de la Dh) et Sébastien Georis de la RTBF radio. S’il ne veut l’avouer qu’à demi mot, Sébastien a fait de ce rendez-vous son objectif de la saison. Maxime Monfort , avec qui il s’entraîne très régulièrement, m’a même confié qu’il ambitionnait un podium. Il s’est même débrouillé pour se faire prêter un vélo de chrono de la part de la fédération avec roue pleine et tout : la classe. Après notre seul et unique entraînement collectif jeudi dernier, nous avons un peu peur avec Julien de ne pas être à la hauteur de notre super équipier. Le tirage au sort nous offre l’honneur d’ouvrir ces Championnats du Monde : on partira comme première équipe... en combinaison Team de Lux puisque le règlement exige que les trois coureurs portent la même tenue ! L'organisation est typiquement flamande: nickel! Cellule photoélectrique pour la prise de temps, commissaires UCI, signaleurs à tous les carrefours, route fermée bien entendu, moto de la police qui nous ouvre la route et voiture suiveuse avec du matos en cas de crevaison. Impressionnant. On a un peu le sentiment d’être les Radioshack au départ d’un clm du Tour. Les locaux nous prennent en photos, les encouragements débutent au compte à rebours du commissaire et le gars qui me tient pour le départ hurle « Kom aan jongen hé ! » C’est parti pour 11 kilomètres d’effort. Comme le disaot Eddy Merckx, un contre-la-montre c'est partir à fond, accélérer au milieu et terminer au sprint. On a convenu que Séba ferait le plus gros du boulot en tête. Avec son vélo de chrono, il envoi du lourd et comme il a reconnu quatre fois le circuit la veille, il connaît toutes les trajectoires à prendre. Le début passe bien, le parcours est très athlétique (jamais un mètre de plat). On hurle « OK », « plus » ou « moins » pour donner le tempo à Seba. Les kilomètres défilent et les relances aussi. Tout à fond la caisse. A deux kilomètres de la ligne, j’aurais du prendre mon relais mais pas possible, je suis à bloc. Mes poumons brûlent et j’ai l’impression que mes jambes vont exploser. Seba diminue l'allure pour que je puisse tenir sa roue (temps est pris sur le 3E coureur). Ca me fait râler de nous faire ralentir mais l’effort est d’une violence extrême et je n’ai vraiment pas l’habitude de ce genre de trucs.
A 300 mètres de la ligne, j’explose complètement mon boyau arrière. Je finis sur la jante à 10km/h pour éviter d’abimer ma roue. On finit 7e sur 13 équipes et sans la crevaison, on gagnait une place. Ce sont des Belges qui l’emportent devant des Anglais. Le matos de certaines équipes est hallucinant. Les gars sur le podium avaient tous un vélo de chrono et une roue pleine. Des bécanes à plus de 7.000 € pour certains Certains se sont même échauffés sur rouleau et avaient loué un motorhome pour le week-end. Comme des pros ! A titre indicatif, on affiche une moyenne de 40km/h contre 43km/h aux premiers.
Une fois descendu de vélo, on retrouve à nouveau tout le sens organisationnel de nos amis du Nord. Massage offert ainsi qu’un petit sac avec un maillot, des produits énergétiques, une tarte aux matons (spécialité du coin) et une grande bouteille de bière. Après une bonne douche, pasta party sous chapiteau. L’organisation a prévu un orchestre, mais pas n’importe lequel : une fanfare qui joue en roulant un vélo. Tordant ! Un talk show nous accompagne à table avec Museeuw et Van Petegem qui parlent du Tour des Flandres. Une super journée ! Samedi : contre-la-montre individuel. Julien et moi avons fait l’impasse pour consacrer notre journée à ces dames et épargner quelque peu nos gambettes. Seba est déçu. Il voulait un podium et termine 15e sur 45. Dimanche : course en ligne. Après avoir été faire changer mon boyau la veille, je prépare soigneusement mon vélo avant de m’enfiler une grosse assiette de pâtes. Le niveau de la compétition que j’ai pu mesurer vendredi m’effraie un peu, mais je me dis que c’est uniquement de l’amusement. NO PRESSION. Je quitte Bruxelles où, pour une fois le vélo est roi (journée sans voiture oblige) pour aller rouler chez les flahutes. Arrivé sur place, je constate que ca souffle et le physique des concurrents (épilés et au physique de coureur) me laisse craindre le pire : me faire lâcher après un tour. On fait une rapide reco du circuit avec Julien et Seba et on constate que le circuit est sans répit : 130 mètres de dénivelé par tour de douze bornes avec l’Eikenmolen (les habitués du Tour des Flandres s'en souviendront, c'est là que Devolder fait la décision lors de ses deux victoires) à deux kilomètres de l’arrivée. Ca va chier dans le ventilo (expression déposée par Augustin), surtout avec le vent qui souffle à mort sur la deuxième partie du parcours. Pour éviter de lancer un trop gros peloton dans ces routes tortueuses, chaque catégorie à sa propre course. Les papys de plus de 39 ans partent avant nous. A 16h, le coup de pistolet raisonne. Départ ultra rapide, les plus costauds veulent faire une première sélection mais seuls quatre ou cinq gars lâchent déjà prise. Je suis super attentif à mon positionnement pour ne pas me faire piéger. A l’approche de l’Eikenmolen, grosse attaque d’un Hollandais mougneu de gouda. On fait toute l’approche à bloc. Pour les habituées du ronde, vous vous souviendrez que cela monte déjà bien dans le village et quand j’ai posé un œil sur mon compteur, j’étais à 37 à l’heure. Je lâche quelque peu dans l’Eikenmolen et ai 50 mètres de retard sur le peloton en haut que je boucherai avant de franchir la ligne.
Cela s’observe à mort dans le peloton alors que nous ne sommes déjà plus qu’une grosse quarantaine contre 50 coureurs au départ. Julien est toujours là et Seba semble à l’aise. Le scénario se répète à la deuxième ascension de l’Eikenmolen mais cette fois, j’ai plus de mal à rentrer. Il me faudra 5 bornes et l’aide d’un Américain avec qui on a relayé pour rentrer. C’est que cette fois le peloton a vraiment mis en marche. Ca commence à flinguer de partout et le peloton se réduit de plus en plus. Je suis content d’en faire encore partie. Frederik Bakelants, un belge qui a été champion du monde il y a deux ans, veut le titre et a monté une équipe autour de lui. Il a carrément ses deux équipiers. Après une série de mini démarrage qui fait très mal aux jambes, s’engage une partie de poker menteur. Cela ne roule plus et un gars tente sa chance en échappée. Les Français et les Belges se regardent en chien de faïence. Cela me permet au moins de récupérer. Mais à mi-parcours, à la faveur d’une bosse, Bakelants place une énorme mine. Je tire une langue jusque parterre pour ne pas lâcher, cela ne se relève pas et l’Eikenmolen m’est à nouveau fatal. Je perds toujours ces cinquante mètres. Je buche pour essayer de rentrer car j’ai le peloton en point de mire, mais cela roule à bloc. Après trois bornes de chasse patate, je comprends que je ne rentrerai pas.
Je me relève pour attendre un groupe, mais j’ai oublié que l’on est sur une vraie course et les autres gars ont été arrêtés par les commissaires à leur passage sur la ligne. Je suis le dernier de la course avec le camion balai aux fesses pour les 5 derniers kilomètres. A l’entame du dernier tout, les commissaires me demandent de me ranger. J’avais alors 1 :30 de retard sur le peloton. 25 types sont encore en course pour la victoire qui se jouera au sprint et verra la victoire de Christophe Moec un français qui travaille pour Vélo Magazine. Julien a été arrêté après le troisième tour et Seba fait aux alentours de la 15e place. Perso, je suis super content de ma course. J’avais vraiment peur de ne pas être à la hauteur et j’estime que j’ai bien supporté les acoups. Alors que j’ai fait le dernier tour seul dans le vent, mon compteur affiche 38.2 de moyenne. L'année prochaine, c'est à gabice mare, en Italie (proche de Rimini) qu'aura lieu la course au maillot arc-en-ciel.